France
November 24, 2009
La septoriose est une des maladies foliaires majeures du blé en France et dans de nombreux pays d’Europe. Deux champignons parasites en sont responsables ; le plus répandu est actuellement Mycosphaerella graminocola. Il peut provoquer des baisses de rendement importantes et ses souches développent parfois rapidement des résistances aux fongicides. Les chercheurs de l’INRA, en partenariat avec l’INRIA*, ont développé des approches de modélisation des épidémies qui prennent en compte la structure des couverts végétaux sur lesquels les épidémies se développent ; ils explorent comment l'architecture des couverts de blé joue un rôle sur la dissémination de la maladie. Ces travaux permettent d’identifier certains des paramètres de l’architecture du couvert impliqués dans le freinage des épidémies.
Dans un champ de blé, la surface des feuilles peut atteindre jusqu'à quatre fois la surface au sol. Comment la septoriose se propage-t-elle au sein de cette structure architecturale? L’approche virtuelle de simulation de plantes et de pathogènes se démarque des approches existantes de modélisation des épidémies car elle intègre explicitement le développement de l'architecture du couvert du blé associée à la prolifération de l'un des ses pathogènes. L’architecture des couverts va en effet définir le support sur lequel se développe les pathogènes. Par exemple, elle va déterminer les distances à parcourir pour les spores afin qu’elles infectent de nouveaux tissus. Les modèles de plante et de pathogène sont dynamiques et combinés pour simuler la progression de l’épidémie. Cette approche est également développée sur vigne par les chercheurs du centre INRA de Bordeaux-Aquitaine.
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Développement de l’épidémie au fur et à mesure que le couvert se développe. L’épidémie résulte d’une succession de cycles infectieux durant lesquels sont produits les spores et de dispersion de spores par éclaboussures (adaptée de Robert et al. 2008) |
Comment l’architecture des couverts de blé joue sur la dissémination de la maladie ?
Dans le cadre du projet INRA-INRIA Virtual Plant, les chercheurs de l’INRA de Versailles-Grignon ont mis au point un modèle virtuel de simulation. Sous différents scénarios climatiques, ils simulent la dissémination de la septoriose au sein du couvert de blé et explorent le rôle de l'architecture du couvert sur le développement de l’épidémie. Leurs travaux ont pour objectif d’identifier des composantes d’architecture du couvert qui permettent de freiner les épidémies.
Le modèle simule, à chaque pas de temps, le développement du couvert (module Développement 3D de blé), le développement des lésions sur les feuilles qui aboutit à la production de spores (module Cycle infectieux) et la dispersion des spores qui est réalisée par splash lorsque des gouttes de pluies atteignent des lésions sporulantes (module Dispersion).
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Trois caractéristiques du couvert interviennent principalement sur le développement de l’épidémie :
- la distance entre les feuilles, car elle limite les flux de gouttelettes, chargées des spores des feuilles infectées vers les feuilles saines du haut du couvert,
- la quantité de tissu foliaire disponible car elle détermine les surfaces de développement des lésions, mais aussi, l’effet "parapluie" des feuilles du haut du couvert sur des surfaces infectantes de la base,
- la densité et l'orientation des feuilles qui modifient le trajet de pénétration de l'eau de pluie et donc les probabilités de transport feuille à feuille des spores.
Ainsi, un tel modèle permet d’identifier les paramètres d’architecture impliqués dans le développement des épidémies. Les paramètres d’architecture qui favorisent les épidémies pourront alors être évités alors que ceux qui la freinent favorisés.
Au niveau du peuplement, une analyse de sensibilité réalisée pour trois types de climat contrastés suggère que l'épidémie de septoriose est freinée :
- de façon significative lorsque la vitesse de développement des plantes est rapide,
- plus faiblement lorsque la surface foliaire est réduite, et lorsque la vitesse d’allongement et la hauteur des plantes sont augmentées.
La construction de cette modélisation ouvre des perspectives sur la prise en compte d'autres interactions entre le développement du blé et celui de son pathogène, comme l'âge des organes de la plante, leur état physiologique par exemple leur teneur en carbone ou en azote, ou encore la lumière et l'humidité induites par des modifications de la structure du couvert. Toutes ces variables affectent en effet les cycles biologiques du champignon responsable de la septoriose.
Ces travaux ont pour application, d'une part, d’aider à la définition de pratiques culturales adaptées aux conditions climatiques qui permettent de diminuer les besoins en traitement phytosanitaire et d'autre part, de concevoir des idéotypes de blés optimisés.
* équipe projet INRIA Virtual Plant (Institut national de recherché en Informatique et Automatique)
Références :
Robert C. Fournier C. Andrieu B. Ney B. 2008.
Coupling a 3D virtual wheat (Triticum aestivum) plant model with a Septoria tritici epidemic model (Septo3D) : a new approach to investigate plant-pathogen interactions linked to canopy architecture
Functional Plant Biology, 2008, 35, 997-1013